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  • Comment bien réhabiliter les habitats en ville ?

Les centres des villes de petites à moyennes dimensions, les préfectures de province, les sous-préfectures, toutes ces cités autrefois si charmantes et, désormais, parfois tristes comme un jour sans fin sont-elles condamnées à mourir ?

Peut-on, va-t-on encore longtemps se priver d’habitats déjà existants, disponibles et ne demandant qu’à revivre ?

Les réinvestir, leur redonner vie puisque, contre vents et marées, ils sont là, bien réels, d’ores et déjà raccordés aux réseaux, semble tomber sous le coup du bon sens.   

Rénover des habitats anciens est pratiquement toujours moins impactant au plan du dérèglement climatique ainsi qu’en consommation de ressources.

La réhabilitation de ces habitats de ville serait plus rapide que de mettre en route des programmes de neuf et apporterait une partie de la réponse aux besoins impérieux de disposer en quantité suffisante d’habitats salubres et peu énergivores.

Ces maisons ou immeubles, implantés dans des milieux à proximité de la campagne et de ce qu’elle représente en terme de capacité à nourrir une population, seraient magnifiquement placés pour une redistribution des habitants de régions à forte concentration vers des régions peu peuplées … alors même que ce sont souvent ces dernières qui produisent la nourriture !

Les autorités affichent la volonté (pdf) d’agir dans ce sens, des aides importantes, programmées, en sont la preuve.

Trop souvent les travaux programmés dans ce genre d’opérations sont orientés vers des solutions que nous qualifierons de conventionnelles et qui, peut-être adaptées au neuf, encore que…, sont très mal adaptées à la rénovation. Elles peuvent même y générer des désordres importants.

Nous espérons que ces vieux centres villes vont revivre, être réinvestisLes futurs occupants n’accepteront pas pour autant d’y vivre moins bien qu’ailleurs, particulièrement au niveau du confort.

Dans cet article nous vous proposons l’approche de solutions non conventionnelles mais parfaitement adaptées aux contraintes de ces bâtis spécifiques.

Elles permettent d’atteindre un confort des plus corrects ainsi qu’une salubrité très souvent supérieure aux solutions conventionnelles.

Préalable

Aucune solution ne doit être prise comme une recette duplicable à l’infini.

Seule l’unicité des cas (donc, forcément, avec des réponses adaptées) est immuable…

Selon ce qui précède, ce que les futurs habitants en attendent, ce que sont les bâtis, à chaque maison, à chaque occupant sa(ses) solution(s).

Nous conseillons l’utilisation de l’outil proposé par CREBA afin de cerner les impacts, possiblement en chaîne, de chaque intervention sur le bâti.

Les solutions ci-après sont parfaitement adaptées aux bâtis anciens à murs massifs tels que ceux en pierre, pisé ou bauge ainsi que pour des murs de maisons à ossature bois à colombage et remplissage par les mêmes éléments. Les maisons et petits immeubles de ville sont, majoritairement, de ce type. Ceux qui seraient plutôt en béton ou parpaings devront être traités de la même manière que les maisons décrites dans l’article de la présente série “confort” qui leur est dédié.

Enduits correcteurs d’effusivité

Nous avons déjà évoqué ici les solutions conventionnelles recommandées par les autorités. Elles sont basées sur l’assimilation du confort à un niveau de température requis et sur le maintien à cette température au moindre coût du fait de l’isolation des parois extérieures, murs compris.

Il s’agit là d’une supercherie car le ressenti de confort est infiniment plus complexe et la température de l’air ambiant dans lequel nous y vivons n’y contribue que pour une part. Celle-ci est difficile à établir de façon précise mais lorsque l’on sait que nous perdons 60% de nos calories par rayonnement, lorsque l’on sait que idéalement nous devrions compenser ces pertes en captant du rayonnement, il est au moins certain que cet élément est plus important que la température de l’air ambiant.

L’une des autres sources de ressenti de confort est l’humidité relative ambiante et c’est là que se situe la supercherie : l’humidité relative moyenne de ressenti de confort se situe vers 55%. Vu les émissions de vapeur d’eau dans l’air suite à l’évaporation des remontées capillaires (article à venir très rapidement), vu les émissions de vapeur d’eau que nous générons dans nos bâtis, l’humidité relative de l’air intérieur de nos habitats est très souvent bien supérieure et le plus simple pour la faire baisser est de chauffer l’air … Alors de là à expliquer qu’il faut isoler pour ne pas perdre trop de calories et donc n’avoir pas à payer trop de chauffage, il n’y avait qu’un pas … qui a été allègrement franchi et érigé en norme !

Et depuis lors, tout le monde nous parle de “passoires thermiques”.

Oui les bâtis fuient, mais serait-ce si grave s’ils pouvaient être confortables à des températures plus faibles, donc avec un moindre besoin naturel de chauffage ?

C’est ce que nous allons aborder ci-après.

Sur quels principes étayons-nous nos préconisations ?

Principalement sur l’effusivité, qualité que nous avons largement décrite ici.

Fonctionnement des enduits correcteurs d’effusivité

Le pari relevé ici est de miser sur une température de surface plus élevée au niveau du parement.

Réaliser un enduit quiau lieu de capter la chaleur générée par l’arrêt d’un rayonnement, renvoie une majeure partie de ce rayonnement permet d’atteindre ce résultat.

Enduit chanvre/chaux en cours de réalisation

Nous avons testé, j’ai testé chez moi la réalisation d’un tel enduit (chaux/chanvre), en guise de parement intérieur d’un mur extérieur, ceci dans une pièce non chauffée.

J’ai fait cette réalisation aux fins de test de tenue sur un support (trop) lisse. Il se trouve, effet du hasard, que j’ai manqué de matière pour finir les quelques cm² d’un mur exposé nord-est, donc non réchauffé par le soleil d’hiver (environ 30 cm² non réalisés sur 2 m2).

Par curiosité j’ai contrôlé la différence de température de surface en présence d’une épaisseur de 3 cm de cet enduit et en son absence ailleurs : + 1,9° d’écart… sans apport de chaleur intérieur, donc avec un renvoi de rayonnement naturellement limité !

Ce n’est certes pas une démonstration magistrale, mais cette expérimentation est un bel exemple de retour d’expérience.

De très nombreuses personnes ayant réalisé, pour les uns, un enduit chanvre/chaux tel que le mien, pour les autres, un enduit terre/paille ou autre de même nature peuvent témoigner d’une réalité de confort sans isolation épaisse, sans la mise en œuvre du super extra isolant au lambda magistral !

Ces solutions ne répondent pas aux normes conventionnelles de R minimal aux fins de pouvoir bénéficier d’aides diverses, de répondre aux exigences de “performance” de la RT 2012 ou des labels divers.

Nous avons étudié les avantages et les inconvénients de chacun des autres systèmes que sont l’Isolation Thermique Intérieure (ITI) ou Isolation Thermique Extérieure (ITE).

Nous avons vu à quel point ces ITI et ITE, si elles sont une solution, sont loin, très loin d’être dépourvues de handicaps importants, au rang desquels la limitation de l’évaporation de l’eau ou de la perspirance (développés plus en détail ci-après).

On compte aussi, au titre des handicaps, la nécessité d’épaisseur (parfois impossible en extérieur pour des raisons d’alignement de façades ou de recul des limites du terrain, parfois impossibles également par l’intérieur du fait de trop faibles dimensions de pièces ou de passages tels que escaliers et/ou couloirs).

Les enduits  correcteurs d’effusivité présentent l’immense intérêt, au-delà de leur faible épaisseur, de très bien respecter le fonctionnement hygroscopique des bâtis anciens ainsi que leur “élasticité” .

Solutions mixtes 

Il s’agit, avec cette solution, non plus d’isoler réellement ni de miser à 100% sur la correction d’effusivité mais d’utiliser les qualités de 2 principales familles de matériaux : les blocs de chanvre/chaux et ceux en chanvre/ciment naturel.

L’un et l’autre se présentent sous forme de blocs préfabriqués, certaines fabrications sont profilées avec des systèmes d’emboîtement ingénieux qui leur assurent une parfaite continuité.

Une troisième option, relevant du même principe de fonctionnement mais différente dans sa présentation, consiste en la mise en œuvre de béton chanvre/chaux en épaisseur importante, de l’ordre de 6 à 8 cm, 10 même parfois.

Deux techniques en permettent l’application; soit par banchage et coulage en place, soit par projection avec des machines adaptées à cet usage.

Pour des raisons esthétiques, ces 3 types de matériaux nécessitent la mise en œuvre d’un parement final, même peu épais, soit sous forme de plâtre, soit sous forme d’un enduit à la chaux ou encore un enduit terre.

Enduits “lourds” (en sus des isolants)

Ces enduits peuvent améliorer considérablement le rendement des solutions faisant appel, pour les murs, aux Isolations Thermiques par l’Intérieur (ITI) ainsi qu’améliorer le rendement des isolations des combles perdus ou des toits dans le cadre de combles habités.

Pourquoi des besoins en sus des isolants ?

L’isolation en ITI des murs extérieurs ainsi que celles des combles perdus ou des toits des combles habitables ne sont, malheureusement, pas majoritairement réalisée à base d’isolants biosourcés, mais le plus souvent avec des solutions faisant appel à des matériaux d’origine minérale et/ou pétrochimique.

Ils affichent de très bons à excellents lambdas et assurent une très bonne efficacité au plan isolation, sauf que … nous ne cessons de le dire, ce critère n’est pas l’alpha et l’oméga de la performance énergétique et il s’agit même d’un abus que de le faire croire aux utilisateurs !

Le plus important pour le confort, comme expliqué ci-avant, c’est le niveau de rayonnement et la teneur en vapeur d’eau de l’air ambiant. Viennent ensuite la stabilité de la température et, enfin, la température de l’air.

Le lambda permet de limiter les fuites de calories et donc de maintenir à une température déterminée à un coût moindre.

Ok, dont acte, mais qu’en est-il des autres besoins pour atteindre un niveau de confort correct ?

Stabilité de la température

Elle est assurée par l’inertie des matériaux. Elle dépend de la chaleur massique du composant, laquelle caractérise la diffusivité. La densité des produits est également prépondérante.

Les isolants d’origine minérale sont très peu performants dans ce domaine, ceux d’origine pétrochimique sont un peu meilleurs, ceux d’origine végétale sont, et de loin, les champions dans cette catégorie de produits.

La diffusivité stabilise la température l’hiver (captation des calories, inertie) et le déphasage prend le relais l’été (transfert lent des calories d’une face à l’autre de l’isolant).
Attendu que les parois supérieures (plafond ou toit) ne disposent pas de matériau massif susceptible de pallier à ces manques, il faut, ici, beaucoup “compenser”.

Le choix de parements lourds et relativement épais permettra d’y “piéger” et stocker des calories, ce qui, par effet secondaire (positif !), permettra de disposer d’une surface relativement chaude et qui, l’hiver, du fait de cette température plus élevée émettra plus de rayonnements infrarouges, ceux qui, directement, nous chauffent.

Régulation de l’humidité relative

Ces matériaux devront être choisis en fonction de leurs capacités à capter l’humidité éventuellement en excès dans l’air ambiant et de relâcher cette eau lorsque l’air ambiant deviendra trop sec. Ils devront aussi permettre l’évaporation des remontées capillaires. Ils doivent donc être à la pois perméables aux flux de vapeur et en capacité de « conduire » de l’eau par capillarité.

On sait à quel point le bois est en capacité d’assurer ces rôles, on le sait moins, mais les enduits massifs à base de terre ou de chaux sont aussi dotés de ces capacités.

Il sera nécessaire de les choisir en fonction de leurs performances réelles dans ces domaines.

Nous citerons, liste non exhaustive et sans classement en terme de performance : les enduits terre; les enduits à base de chaux; les plâtres, sous leurs divers aspects : briques agrafées et plâtrées, fermacell, feuilles de plâtre cartonnés; les lambris et bardages bois, panneaux de bois … 

Amélioration des murs isolés en ITI    

Il n’est pas évident qu’au global d’une approche bénéfice/coût d’une isolation (prenant en compte non seulement les économies d’énergie à l’exploitation mais aussi l’énergie consommée du fait de la fabrication et de l’installation des divers systèmes et matériaux) soit aussi pertinente que beaucoup le claironnent, et que la législation, dans certains cas, l’impose, soit effectif et réel. Pour autant, très souvent les murs des maisons de ville, au même titre que celles de secteur diffus, sont isolés.    

Souvent, pour de multiples raisons, ils le sont par l’intérieur.

Cette option, non dépourvue d’intérêt lorsqu’elle est faite avec des matériaux bio-sourcés, est réalisée avec des isolants peu performants au global. Comme décrit ci-avant, il est important d’en améliorer le “ressenti” en matière de confort en leur adjoignant des parements lourds

Il faudra bien sûr protéger ces isolants via des pare-vapeurs mis en œuvre dans les règles de l’art. Ils assureront également le rôle d’étanchéification au vent.

Diverses solutions sont possibles, elles vont de la mise en œuvre de  briquetage léger complété par un plâtrage traditionnel en passant par la pose de plaques à base de plâtre de type Fermacell, chargées d’enduits épais soit en terre, soit en sable et chaux, sans oublier les options de panneaux épais en terre.

Conclusion

Aucune solution n’est totalement parfaite, aucune n’est non plus totalement imparfaite. Alors pourquoi certaines sont-elles préconisées, sans plus d’avantages que d’autres qui, elles sont bannies ou, à tout le moins, ignorées ?

Y aurait-il des intérêts particuliers qui bénéficieraient à certains ?

Y aurait-il des solutions qui, nécessitant plus de calculs, donc plus difficiles à “cerner”, plus diverses et même parfois faisant appel à des ressources locales, seraient moins privilégiées que d’autres ?

Y aurait-il des solutions qui, vu leur large préconisation, vu le peu d’acteurs produisant les éléments mis en œuvre, procureraient des moyens d’influence à ces acteurs et, disons le clairement, seraient favorisées suite à des actions de lobbying ?

Nous n’avons pas de réponse à ces questions.

Par contre, pour les avoir préconisées, pratiquées, parfois même imposées, nous témoignons ici du fait que certaines solutions ne répondant pas aux normes présentent une réelle efficacité (entre autres, celles développées ci-avant).

Elles ne peuvent pas correspondre aux normes car la rédaction de celles-ci rend souvent la chose impossible (pour la simple raison qu’elles répondent à des logiques qui les desservent). Elles ont fonctionné dans le passé, elles fonctionnent encore et elles apportent toutes satisfactions à leurs occupants.

Ces solutions low-tech, appréhendées sous l’angle du bilan global d’analyse de leur cycle de vie (ACV), et les consommations d’énergie nécessaires lors de l’exploitation, notamment en ce qui concerne les enduits correcteurs d’effusivité, soutiennent tout à fait la comparaison avec les solutions high-tech

Notre souhait

Nous aimerions que les autorités de tutelle, les organismes certificateurs, les compagnies d’assurances se penchent avec bienveillance sur l’analyse de ces solutions alternatives et pertinentes.

Crédits Photos : Pixabay, Andréas Krewet (enduit terre/paille), Claude Lefrançois (enduit chaux/chanvre), 

Claude Lefrançois


Après 30 ans dans le bâtiment, ancien charpentier, ancien constructeur, ancien maître d’œuvre, formateur dans le bâtiment, expert en analyse des bâtis anciens avant travaux, auteur de nombreux articles et d’un livre “Maison écologique : construire ou rénover” aux Ed. Terre vivante, auteur de 2 ebooks disponibles sur mon blog, je suis désormais retraité.
Je mets mon temps disponible et ma liberté d’expression à votre service : j’observe et j’analyse, au besoin je dénonce ou émet des idées.
Bonne lecture.

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