Build Green

Les matériaux biosourcés : des alliés performants pour la construction passive

La construction passive est très exigeante en termes d’énergie consommée par le bâtiment, ce qui implique une conception liée aux apports solaires naturels mais aussi un bâtiment fortement isolé et très étanche à l’air. De nombreux matériaux biosourcés ont cette fonction isolante. Au-delà de leur conductivité thermique, leurs autres caractéristiques intrinsèques peuvent avoir une influence sur la performance thermique globale du bâtiment et donc un impact sur le confort ressenti par les usagers. Les matériaux biosourcés sont des alliés de choix pour concevoir des bâtiments passifs à faible impact sur l’environnement.

Construction passive et matériaux biosourcés : quels liens ?

La construction des maisons passives combine différents principes constructifs pour l’obtention de bâtiments très basse consommation. Ainsi on va chercher l’apport de chaleur naturelle (orientation et ensoleillement du bâtiment), les bâtiments seront fortement isolés pour garantir le confort à l’intérieur du bâtiment en hiver comme en été et l’absence de ponts thermiques. Enfin les bâtiments devront être très étanches à l’air, l’air sera donc renouvelé via la mise en place d’une VMC.

Quatre critères permettent de déterminer si un bâtiment peut obtenir la labellisation « Bâtiment Passif / Passivhaus » :

Les caractéristiques intrinsèques des matériaux biosourcés vont permettre d’aller facilement vers une démarche de construction passive et écologique. On va citer ici principalement les caractéristiques des matériaux biosourcés isolants qui vont avoir un réel intérêt pour le bâtiment passif.

Les caractéristiques des matériaux et produits biosourcés sont principalement liés : 

La première caractéristique à regarder pour le bâtiment passif est la conductivité thermique (λ) exprimé en W/m.K. En effet plus la conductivité thermique des matériaux est faible plus le matériau est isolant. C’est donc une caractéristique importante à regarder lorsque l’on veut avoir un bâtiment fortement isolé sans avoir des murs trop épais. Le tableau ci-après récapitule les conductivités thermiques de différents produits biosourcés.

Types d’isolants biosourcés Conductivité thermique moyenne Epaisseur d’isolant nécessaire pour un coefficient de transmission thermique U < 0,15 W/m².K
Isolants semi-rigides à base de fibres végétales (bois, chanvre, coton recyclé, laine de mouton, ou mix de différentes fibres) Comprise entre 

0,036 et 0,040

Entre 24 et 27 cm
Isolants rigides à base de fibres de bois Comprise entre 0,04 et 0,042 Entre 27 et 28 cm 
Isolants en vrac (ouate de cellulose)
Béton végétaux (chanvre, bois majoritairement) Dépend du dosage en liant dans la formulation : comprise entre 0,06 (250 kg/m3) et 0,15 (800 kg/m3).

Les bétons dosés à 800 kg /m3 servent principalement pour réaliser des enduits 

Entre 40 et 54 cm pour un béton dosé entre 250 kg/m3 (à privilégier en toiture) et 400kg/m3 (en murs).
Bottes de paille La botte posée sur chant à une conductivité de 0,052 W/m.K

La botte posée à plat à une conductivité thermique de 0,08W/m.K

Les bottes posées sur chant ont une épaisseur non variable de 37 cm qui satisfait aux standards du bâtiments passifs : R= 6,92m².K/W donc U=0,145 W/m².K

Tableau 1: Conductivités thermique de différents produits biosourcés et épaisseur nécessaire pour satisfaire aux exigences de la construction passive

La seconde caractéristique intéressante à regarder pour les matériaux biosourcés isolants est leur capacité thermique massique, aussi appelée chaleur spécifique. Elle traduit la capacité d’un matériau à accumuler de l’énergie sous forme de chaleur par rapport à son poids. Elle est exprimée en J/kg. K puisque qu’elle représente l’énergie qu’il faut apporter à 1kg de matière pour que sa température augmente de 1 kelvin.

Plus le matériau aura une grande capacité thermique plus il pourra stocker de l’énergie tout en ayant une augmentation de température relativement faible. Cette capacité permettra donc de conserver la fraîcheur au sein du bâtiment lors de fortes périodes de chaleurs. Cette grandeur est donc à bien prendre en compte, lors du choix des matériaux qui composeront l’enveloppe d’un bâtiment passif, lorsque l’on cherche à garantir le confort d’été.

Le diagramme ci-après récapitule les données de différents matériaux isolants. Globalement on note que les isolants biosourcés ont des chaleurs spécifiques plus importantes que les isolants conventionnels. Les matériaux biosourcés isolants présentant les capacités thermiques les plus élevées sont les matériaux à base de cellulose ou de fibres de bois.

A partir de la capacité thermique massique il est aussi possible d’évaluer la capacité thermique volumique ou chaleur volumique d’un matériau qui représente alors sa capacité à emmagasiner la chaleur par rapport à son volume. 

Figure 1 : Comparaison des chaleurs spécifiques de différents matériaux isolants.

Pour garantir le confort d’été mais aussi le confort d’hiver, deux autres caractéristiques sont aussi à prendre en compte : le déphasage et l’inertie thermique. Le déphasage thermique est la capacité d’un matériau ou d’une paroi à retarder les transferts de chaleur d’un côté à l’autre. Les parois possédant un bon déphasage thermique (compris entre 8h et 12h) sont particulièrement intéressantes puisque l’on peut par exemple décaler en période estivale l’arrivée d’un surplus de chaleur aux heures nocturnes, plus fraiches. 

L’inertie quant à elle est la capacité du matériau à stocker de la chaleur, puis à la restituer progressivement lorsque la température de l’air environnant diminue par rapport à celle de la surface du matériau. Une forte inertie permet donc d’améliorer le déphasage, mais aussi de maintenir la température d’un bâtiment une fois celui-ci chauffé en hiver par exemple. L’inertie dépend de la densité des matériaux (plus un matériau sera lourd et compact plus son inertie thermique sera importante) mais aussi de sa capacité thermique massique. En combinant une ossature bois et des isolants biosourcés, éléments peu denses mais possédant une forte capacité thermique massique, on peut tout de même avoir un bâtiment possédant une bonne inertie.

Le tableau [CEREMA, 2016] ci-dessous, récapitule les déphasages de différents matériaux isolants pour une épaisseur de 20 cm :

Masse Volumique (kg/m3) Conductivité thermique λ (W/m.K) Capacité thermique massique (J/kg.K) Capacité thermique volumique (kJ/m3.K) Déphasage (h) pour 20 cm de paroi
Polystyrène expansé 25 0,04 1450 36 4,7
Ouate de cellulose 40 0,04 2150 86 6,6
Isolant semi-rigide en fibres de bois 75 0,04 2100 108 7,6
Isolant rigide en fibres de bois 160 0,04 2100 336 13,3
Panneau de liège 120 0,04 1600 192 10
Isolant semi-rigide en fibres de chanvre 30 0,04 1600 48 5
Mélange chaux chanvre 440 0,11 1560 686 11,5

Tableau 2: Caractéristiques thermiques et déphasage de différents matériaux isolants

Ensuite il faut rajouter que les matériaux biosourcés sont naturellement hygroscopiques : en contact avec l’air intérieur ils vont absorber ou dégager de la vapeur d’eau. Dans un bâtiment très étanche, cette hygroscopicité va être complémentaire de la VMC pour une meilleure régulation de l’hygrométrie de l’air ambiant, ce qui va améliorer le confort et le ressenti pour les occupants.

Enfin la plupart des matériaux biosourcés ont un comportement hygrothermique, c’est à dire un comportement spécifique au sein d’un environnement dans lequel la température et l’humidité varient. Absorption et dégagement d’énergie (sous forme de chaleur) ont lieu lors de transferts d’eau au sein du matériau (phénomènes de sorption-désorption).

Le comportement hygrothermique d’un matériau est fortement lié à sa nature (matière qui le constitue) et à sa porosité, par conséquent, tous les matériaux n’ont pas les mêmes caractéristiques par rapport aux variations hygrométriques, hydriques et thermiques. Les matériaux biosourcés font l’objet depuis plusieurs années, d’études visant à comprendre et à caractériser leur comportement hygrothermique.

Ces études ont établi qu’il y avait un lien entre le comportement hygrothermique d’un matériau et la performance thermique d’une paroi et par conséquent, un effet sur la performance énergétique du bâtiment. En plus de ces performances particulières qui jouent un rôle important dans le confort intérieur d’un bâtiment, il est important de rappeler que certains matériaux biosourcés (enduits) limitent les écarts de température entre la température de la pièce et la température de surface de la paroi, ils évitent l’« effet de paroi froide », souvent à l’origine d’une sensation d’inconfort pour les occupants.

Des matériaux déjà plébiscités pour la construction de bâtiments passifs

Sur la base de données de la maison passive [Passivhaus-Datenbank], on trouve 322 bâtiments passifs référencés en France :

Sur les 149 bâtiments conçus en structure bois, la majorité sont isolés avec de la ouate de cellulose en remplissage de murs et pour l’isolation des toitures. On retrouve également la ouate de cellulose souvent utilisée avec des panneaux rigides à base de fibres de bois. Quelques bâtiments référencés sont construits selon les principes de la construction en paille. Ci-après sont présentés deux bâtiments passifs construits en matériaux biosourcés avec des principes constructifs différents.

Conclusion 

A travers cet article on a vu que les matériaux biosourcés, par leurs caractéristiques intrinsèques, permettent d’ores et déjà de concevoir des bâtiments très performants du point de vue de leur consommation énergétique. 

Le passif promeut la sobriété dans la construction, mais cette logique doit s’étendre à l’ensemble du cycle de vie, et donc à l’énergie grise des matériaux en particulier. Ainsi, il faut maintenant aller plus loin en considérant les impacts des bâtiments du point de vue de la renouvelabilité des matériaux utilisés et de la séquestration du carbone au sein des bâtiments.

 

Notre avis : La construction passive est très exigeante en terme d’énergie consommée par le bâtiment, ce qui implique une conception liée aux apports solaires naturels mais aussi un bâtiment fortement isolé et très étanche à l’air. De nombreux matériaux biosourcés ont cette fonction isolante. Au-delà de leur conductivité thermique, leurs autres caractéristiques intrinsèques peuvent avoir une influence sur la performance thermique globale du bâtiment et donc un impact sur le confort ressenti par les usagers. Les matériaux biosourcés sont des alliés de choix pour concevoir des bâtiments passifs à faible impact sur l’environnement.

 

Bibliographie :

[Journal Officiel, 2016] Journal officiel n° 0297 du 22/12/2016 :

 https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000033666742

[Label Produits Biosourcés, 2017] : http://produitbiosource.fr/

[KARIBATI,2017] Zoom sur le bâtiment biosourcé : Repères chiffrés sur la filière française : http://www.karibati.fr/zoom/

[CEREMA, 2016] CEREMA, Direction territoriale Est, Laboratoire Régional de Strasbourg, Synthèse bibliographique des études sur la rénovation thermique du bâti ancien à l’aide de matériaux biosourcés, Octobre 2016.

[Passivhaus-Datenbank] http://www.passivhausprojekte.de/index.php?lang=en

[Jean-Marc Gremmel,2013] 3ème Forum International Bois Construction 2013, Une première en Europe : Résidence Jules Ferry à Saint Dié des Vosges, huit niveaux bois-paille. Jean-Marc Gremmel, Le Toit Vosgien.

[CRER Poitou-Charentes] http://www.crer.info/bepos-energie-positive.htm

Karibati est une jeune entreprise innovante née de la conviction que le bâtiment de demain intègrera le végétal pour devenir performant aux niveaux environnemental, économique, social et culturel. Karibati accompagne les acteurs publics et privés qui innovent grâce aux matériaux biosourcés pour le bâtiment. Notre nom associe « kari » qui signifie "jardin" en Maori et « bâti ».