Humanscapes Habitat Urban Living / Auroville Design Consultant. Image John Mandeen

Les pionniers du renouveau de l’architecture en terre : l’Égypte, la France et l’Inde

Les recherches archéologiques visant à explorer les civilisations du passé ont révélé un point commun à travers le monde. Une forme d’architecture développée indépendamment sur chaque continent. Les preuves montrent que les communautés néolithiques (pdf) utilisaient des sols fertiles et de l’argile alluviale pour construire d’humbles demeures, créant ainsi le premier matériau de construction durable et solide de l’humanité. L’architecture terrestre est née à un âge très précoce dans l’histoire humaine. Les techniques ont rapidement subi un déclin progressif à mesure que les modes de vie changeaient, que les villes se développaient et que les matériaux industrialisés prospéraient. L’architecture de terre a-t-elle sa place dans le monde du XXIe siècle ?

New Baris Souk Court / Hassan Fathy. Image © Roland Unger

New Baris Souk Court / Hassan Fathy. Image © Roland Unger

La crise écologique actuelle suscite un regain d’intérêt pour les traditions anciennes, notamment chez les architectes. Le besoin d’une éco-architecture fiable et durable a conduit de nombreux architectes internationaux à explorer l’éco-construction vernaculaire. Une croyance commune est que les pratiques vernaculaires sont ancrées dans leur temps, incapables de trouver une place dans l’environnement bâti contemporain. Cependant, de nombreux exemples à travers le monde montrent à quel point des artisans avertis sont capables de réutiliser leurs compétences de manière nouvelle.

L’architecture du passé propose des stratégies de construction qui déclenchent des innovations techniques. Les matériaux à base de terre et leurs processus alliés connaissent une résurgence mondiale, motivés par l’espoir d’un avenir écologiquement résilient.

Centre for Earth Architecture / Kéré Architecture. Image Iwan Baan

Centre for Earth Architecture / Kéré Architecture. Image Iwan Baan

Egypte : Hassan Fathy

Dans les années 1940, l’architecte égyptien Hassan Fathy a mené un renouveau de la construction en terre dans son pays d’origine. Il croyait fermement à l’importance des valeurs humaines. Fathy a identifié le besoin primordial de programmes de logement à vocation sociale, en particulier pour l’Égyptien commun. Sa philosophie était motivée par la découverte de solutions architecturales abordables adaptées au contexte local. Tout au long de sa carrière, il a adopté des technologies traditionnelles et des formes vernaculaires adaptées au climat et aux économies locales.

Dar al-Islam Mosque / Hassan Fathy. Image © Omar Bárcena

Dar al-Islam Mosque / Hassan Fathy. Image © Omar Bárcena

Fathy a reconnu la nécessité des techniques de construction coopératives et s’est tourné vers la terre pour son utilisation polyvalente. La terre – étant un matériau facilement disponible et abordable dans la région – s’est avérée être une solution pour améliorer les conditions des ruraux pauvres d’ Égypte. Le matériau local nécessite peu ou pas de traitement industriel ou de transport, ce qui permet d’économiser de l’énergie et des ressources. En Égypte, la boue argileuse est abondante, elle peut être recyclée et possède d’excellentes propriétés thermiques pour la chaleur de la région. Le matériau est facile à utiliser et il existe une disponibilité de maçons qualifiés. Ici, les briques de terre sont séchées au soleil plutôt que cuites dans des fours, ce qui en fait une alternative à faible technologie et à faible consommation d’énergie.

Fathy débordaient d’imaginations innovantes de concepts architecturaux anciens d’Egypte. Ses bâtiments en terre étaient sains dans les facettes structurelles, lui permettant d’explorer les formes architecturales. Les cinq décennies de carrière de Fathy, pionnier de l’architecture terrestre, ont influencé un large éventail de structures dans les pays du Sud. De nombreux architectes indiens se sont référés à ses exemples d’architecture de terre localisée pour l’appliquer dans des contextes modernes. Ses principes se sont répandus à travers l’Afrique, le Moyen-Orient et finalement le Nouveau-Mexique.

France : CRAterre

La France est l’un des rares pays qui abrite les techniques les plus importantes de l’architecture en terre comme le torchis, les briques de terre crue (BTC ou Adobe) et la terre battue (pisé). Sur les traces d’ Hassan Fathy et de François Cointeraux, le groupe de recherche français CRAterre se concentre sur le développement de techniques d’architecture en terre. Sous l’impulsion de la révolution écologique de la fin des années 1970, CRAterre promeut une stratégie globale de régénération et de modernisation de l’art de construire en terre. Le groupe a été pionnier dans l’exploration du potentiel de la construction vernaculaire en France et dans le monde.

Prototype par CRAterre. Image CRAterre

Prototype par CRAterre. Image CRAterre

L’association à but non lucratif a pour mission de maintenir vivantes et largement diffusées les informations transmises traditionnellement. Grâce à une formation spécialisée, à la recherche et à l’expérience pratique, le groupe familiarise les étudiants avec les créations architecturales en terre. Les recherches exploratoires de CRAterre les ont amenés à développer des méthodes de pointe telles que le béton de terre coulée, les mélanges de terre crue et de fibres végétales, les préfabriqués en pisé et les ouvrages en terre imprimés en 3D.

Construction prototype par CRAterre. Image CRAterre

Construction prototype par CRAterre. Image CRAterre

Depuis sa création, les programmes de formation de CRAterre se sont alliés à une stratégie visant à réunir un large éventail de collaborateurs – bâtisseurs, scientifiques, enseignants et étudiants. Des prototypes grandeur nature de logements sociaux en terre crue ont été développés à travers le monde, dont certains ont été construits et utilisés. Leur processus implique une analyse approfondie de la culture et de la population résidente de chaque bâtiment local. Des éléments macro et micro-territoriaux comme les matériaux locaux et les besoins culturels sont combinés pour créer une architecture contemporaine en terre.

 

A savoir : la terre inspire de plus en plus d’acteurs en France.

Terres à pisé cartographie les sites et ensembles remarquables en pisé ainsi que les initiatives locales et les acteurs qui les portent à l’échelle de la région Auvergne-Rhône-Alpes et plus particulièrement sur le territoire d’Isère, Porte des Alpes ; Elle développe aussi les échanges et la réflexion sur les outils et mécanismes utilisés ou à développer autour de sa mise en valeur.

D’autres associations comme AS Terre ou Lesa contribuent au développement du matériau, à la formation et à la constitution de réseau de professionnels émérites.

Amaco : est un des plus grands ateliers français qui accompagne les professionnels et futurs professionnels de la construction, de l’architecture et du design dans la conception et la réalisation de projets transformant les matières naturelles disponibles localement en matériaux de construction. Amaco organise aussi des formations apprendre à penser et à construire avec des matériaux géo- et bio-sourcés

Des architectes ont déjà mis en oeuvre des projets à base de terre comme Philippe MadecCaracol Architectures, les Ateliers Alp, Kara ou  TERRamata et l’incontournable Dominique Gauzin-Müller

 

Inde : Institut de la Terre d’ Auroville

Dans l’économie du carbone la plus importante et la plus dynamique au monde, l’Auroville Earth Institute (AVEI) a été créé pour tester et faire proliférer la pratique des techniques de construction durable en terre. Dans les années 1980, le fondateur Satprem Maini est devenu l’une des premières personnes à suivre les formations de CRAterre. Il a ramené ses connaissances en Inde pour créer AVEI en tant qu’initiative de formation d’étudiants en architecture terrestre. Grâce à des ateliers participatifs réguliers, l’Institut s’efforce d’éduquer et d’habiliter les gens à construire leurs propres structures en utilisant des techniques en terre.

Realization Community / Auroville Earth Institute. Image Auroville Earth Institute

Realization Community / Auroville Earth Institute. Image Auroville Earth Institute

L’organisation à but non lucratif est impliquée dans la recherche, le développement, la promotion et le transfert de technologies de construction basées sur la terre, menant simultanément un mouvement à travers le sous-continent indien. AVEI a inventé un type de brique de terre comprimée fabriquée avec une série de presses à blocs manuelles et mécanisées. Ils ont également développé une large gamme de techniques utilisant la terre stabilisée, notamment pour les voûtes et les dômes. Ces prototypes ont trouvé une place dans les bâtiments publics et les initiatives de logement à faible coût à travers l’Inde.

Sharanam / Auroville Earth Institute. Image Auroville Earth Institute

Sharanam / Auroville Earth Institute. Image Auroville Earth Institute

AVEI souhaite profiter de la longue histoire d’auto-construction de l’Inde vue dans les pratiques vernaculaires. Établissant un « nouveau vernaculaire » utilisant la technologie moderne avec de la terre stabilisée, leur philosophie est basée sur une formation transversale aux matériaux locaux et aux techniques contemporaines. L’Inde moderne s’est développée si rapidement que l’architecture vernaculaire n’a pas eu le temps de rattraper son retard. AVEI place la terre au premier plan pour réinventer la modernité en Inde.

Traduit de l’article écrit par  sur Archidaily

 

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Pascal Faucompré
Editeur et Rédacteur en chef de Build Green, le média participatif sur l'habitat écologique et pertinent. Passionné par le sujet de l’éco-construction depuis 2010. Également animateur de nombreux réseaux sociaux depuis 2011 et d'une revue de web sur : Scoop.it

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