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Pare-vapeur, frein-vapeur, rien du tout, qui a raison ? Faut-il prévoir une barrière à la vapeur d’eau ? Si oui, pourquoi ? Pare-vapeur ou frein-vapeur ? Où doit-il être mis en œuvre par rapport à l’isolant ? Encore un sujet clivant, tant au niveau de la dénomination, que des besoins et/ou des mises en œuvre.

Avant de commencer, vous voudrez probablement aussi regarder le replay de ma conférence sur le sujet.

Diverses “chapelles” ont vu le jour au fil du temps, parfois totalement opposées, parfois d’accords sur la position à tenir et, même si accord sur le fond, parfois avec désaccord sur les raisons de la position adoptée.
S’ajoutent des terminologies qui ont évolué, des fonctions qui se sont cumulées, des obligations qui, comme toujours lorsqu’il y a contrainte, n’ont pas forcément été bien acceptées.

Faisons  un point, le plus exhaustif et impartial possible dans les argumentations.

Fonction première

Il est apparu, au fil des ans, au fil de l’évolution de nos modes de vie, au fil de l’évolution de nos habitats que, de plus en plus souvent, nos parois extérieures concentrent des désordres, à la fois visuels, mais aussi structurels et, surtout, menaçants pour notre santé.

Nous allons développer au fil de cet article pourquoi et comment ces désordres apparaissent et en quoi ils peuvent être néfastes.

Ce sont des auréoles d’humidité, suivies assez rapidement de taches grises puis, au final, apparition de moisissures.

Le constat a été fait, au fil des études, qu’un des moyens d’endiguer ces phénomènes (ou tout au moins de participer à leur résolution) est de permettre l’évacuation d’une partie de la vapeur d’eau au travers des parois, ce qu’on appelle la perspirance (pdf). Il est d’autant plus important de gérer ces flux de vapeur qu’elle se cumule souvent à des apports inhérents aux parois elles-mêmes telles que les remontées capillaires. Pour schématiser, disons que telle une mèche dans un liquide voit celui-ci la remonter, un mur, ancré dans le sol, voit l’eau le “remonter” depuis le sol. Ceci est omniprésent dans les bâtis anciens car, contrairement aux constructions récentes, ils ne comportent pas de rupteur de remontée capillaire. Il est donc encore plus important d’en tenir compte dans ces vieux bâtis.

Chaque source d’apport d’eau dans les parois extérieures doit être gérée, c’est de ce constat et de cette obligation qu’est née la notion de système de gestion du transit de la vapeur d’eau. Le système inventé a été baptisé, selon les cas, Pare-vapeur ou Frein-vapeur.

Un peu de sémantique

Pare-vapeur

Etymologiquement le préfixe “pare” sous entend “protégé de” ou “parer”, dans le sens de se prémunir. La racine est latine “parare

Il n’y a pas là d’exclusive comme on l’entend souvent dire mais de “faire parade à”, ce qui ne signifie pas annuler la chose, mais en éviter les conséquences.

Une exclusion totale serait plutôt désignée par “anti”.

Un exemple : parapluie ne signifie pas qu’il ne va pas pleuvoir, mais qu’on va se prémunir contre la pluie, la gérer sans en subir les inconvénients. Paratonnerre  ne signifie pas qu’on va arrêter ou empêcher la foudre mais s’en prémunir.

Il en va de même pour la vapeur, on cherche avec un pare-vapeur à se prémunir d’éventuels désordres qu’elle pourrait provoquer.

Le mot est donc bien choisi !

Frein-vapeur

Etymologiquement, freiner ne signifie pas réguler, mais ralentir la progression. Or ralentir le transit de la vapeur serait-il suffisant pour se prémunir d’éventuels désordres consécutifs à un excès de vapeur ? Probablement pas.

Le mot frein-vapeur n’est donc pas adéquat !

Et pourtant …

Les habitudes étant fortement ancrées, diverses appellations étant encore, à tort à notre avis, souvent usitées, ce qui correspondrait à une appellation « Frein-vapeur » est (pour les autorités certificatrices et pour nous à leur suite) un pare-vapeur à SD faible.

D’où vient la vapeur d’eau dans l’air ambiant d’une maison ?

Autrefois, l’activité principale étant l’agriculture, la vie des humains se passait beaucoup soit à l’extérieur, soit dans les bâtiments agricoles. Aujourd’hui les habitudes de vie ont radicalement changé, nous vivons essentiellement confinés, soit dans les locaux d’activité, soit dans nos habitats.

Nous avons aussi très nettement changé nos modes et habitudes de vie.

Voyons une liste sommaire et non exhaustive des habitudes de vie d’antan dans la maison :

  • un humain se lavait sommairement le visage chaque matin,
  • il faisait, ce qui était appelé “la grande toilette”, une fois par semaine via quelques litres d’eau tiède dans une bassine,
  • la cuisine était réalisée sur le feu, dans une marmite suspendue au-dessus de l’âtre,
  • le linge était lavé à l’extérieur et lorsque les conditions climatiques le permettaient,
  • il  était mis à sécher à l’extérieur,
  • les sols étaient balayés mais lavés très rarement, voir jamais pour le cas, entre autre, des sols en terre battue.

Quels changements dans nos comportements :

Linge séché à l’air ambiant à l’extérieur
  • Chacun prend, peu ou prou, une douche par jour, parfois un bain, le plus souvent avec de l’eau bien chaude donc fortement émettrice de vapeur,
  • la cuisine est désormais réalisée loin de toute cheminée naturelle d’évacuation,
  • le linge est lavé à l’intérieur,
  • il est même parfois mis à sécher à l’air dans l’habitat,
  • les sols sont lavés très souvent.

… bref, nous émettons beaucoup de vapeur d’eau chaque jour, un peu du fait de notre métabolisme, mais surtout du fait de nos activités. Les quantités émises sont de l’ordre de 2,5 à 4 litres d’eau par jour et par adulte (pdf). La majeure partie de nos activités émettrices étant réalisées dans nos habitats, chaque adulte génère l’équivalent de 1,5 à 2,5 litres d’eau sous forme de vapeur dans son habitat.

Comment se comporte la vapeur d’eau d’un habitat ?

L’eau, selon sa température, se trouve en 3 types d’état. Le plus courant est l’état liquide, le changement le simple est est le passage à l’état solide : pour une eau pure, à l’altitude de la mer, en dessous de 0°C, l’eau gèle. Par contre le passage de l’état liquide à l’état gazeux et vice et versa est beaucoup plus variable. Elle dépend de la température et de la pression exercée.

Voicis une vidéo qui, bien que axée sur l’explication du “pourquoi des nuages”, explique parfaitement le principe de l’évaporation et celui de la condensation. Nous vous la conseillons dans sa totalité bien que ce qui nous intéresse pour cet article se situe principalement entre 7’ et 12’.

Nous en retiendrons principalement que la possible teneur en vapeur d’eau est variable selon la température de l’air, la présence ou non de noyaux de condensation dans l’air (minute 12.50 environ) et de la pression exercée (l’enthalpie).

Pour ce qui concerne un habitat, ce qui impacte l’eau et son passage de l’état gazeux (invisible dans l’air) à l’état liquide est la température de l’air qui la contient.

Plus un air est chaud, plus il peut contenir d’eau sous forme de vapeur. Ceci est trés bien illustré par le diagramme de Mollier.

Les quantités d’eau contenue dans de l’air sous forme de vapeur, ce que l’on qualifie d’humidité relative,  et les quantités de cette même eau, mais cette fois sous forme liquide est ce qu’on appelle l’humidité absolue. Ces notions ont déjà été développées ici dans un article intitulé Qualité de l’air : pourquoi et comment ventiler ?

L’hiver, lorsque l’air intérieur chaud et chargé en vapeur d’eau se rapproche des parois extérieures plus froides, il se refroidit et, ce faisant, la vapeur d’eau se condense, en surface des murs ou vitrages, c’est ce qu’on appelle de la buée. Si les conditions repoussent cette matérialisation d’eau liquide dans l’épaisseur des cloisons, on l’appelle alors un point de rosée.

Pourquoi devons-nous gérer la vapeur d’eau ?

Nous voulons vivre dans nos maisons en y ressentant un confort (vidéo) le meilleur possible.

Une partie de ce ressenti est due à la température ambiante dans laquelle nous vivons.

La température, élevée au regard de celle qui, l’hiver, règne à l’extérieur de la maison est atteinte et maintenue via le chauffage.

Pour limiter que ce chauffage coûte trop cher et, accessoirement, pollue, il faut endiguer la perte des calories. C’est pour cette raison que nous isolons nos habitats.

Une autre partie du ressenti de confort est due à un niveau de rayonnement (vidéo) équivalent de toutes les parois et de tous les éléments constitutifs de la maison. C’est pour cette raison qu’il est bon qu’un habitat soit traité et/ou isolé de la même façon et avec un niveau de performance équivalent pour tous ses éléments.

Enfin une autre source, à la fois de coût et d’inconfort, concerne les mouvements d’air par convection et les fuites d’air, petites et grosses. Pour maîtriser les fuites nous étanchéifions nos habitats.

Changements dans nos maisons :

Nous émettons plus de vapeur d’eau dans notre volume de vie, notre air est plus chaud et peut donc contenir plus de vapeur d’eau, nos habitats sont de plus en plus étanches au vent.

Formation de points de rosée

Même si le climat semble irrémédiablement évoluer vers un réchauffement, l’hiver, il continuer à faire plus froid dehors qu’à l’intérieur …

Même si nos habitats sont étanches au vent, notre air intérieur chaud, comme tout ce qui est soumis à la chaleur, est dilaté et donc migre de l’intérieur vers l’extérieur et …

… La conjonction de ces trois phénomènes fait que nos parois sont infiniment plus exposées à la formation de points de rosée qu’autrefois.

Méfaits des points de rosée

La conséquence d’un point de rosée est la matérialisation d’eau liquide. Si les conditions requises durent suffisamment, de l’eau peut se condenser en quantité importante.
Le point de rosée se matérialisera là où le choc thermique sera le plus important, donc le plus souvent dans l’isolant.

Inactivation de l’isolant

La plupart des isolants fonctionnent par emprisonnement d’air rendu captif entre des fibres (2 dernières minutes de la vidéo).

Si l’air captif est remplacé par de l’eau, l’isolant n’isolera plus … Dommage car le point de rosée sera d’autant plus important qu’il fera froid dehors et que nous nous confinerons bien au chaud dans le volume habité et que c’est précisément au moment où nous en aurions le plus besoin que l’isolant sera défaillant !

Atteintes aux murs en béton

Les murs en béton ou en éléments préfabriqués à base de béton au ciment Portland sont “armés” avec des ferraillages.

La présence d’eau peut les faire rouiller, ce qui en provoque le gonflement. Ce gonflement provoque l’apparition de micro-fissures, lesquelles vont rapidement devenir des fissures. Elles vont favoriser l’infiltration d’eau dans la paroi et, si cette eau gèle, du fait de son expansion, elle provoquera l’éclatement du béton, pouvant aller jusqu’à porter atteinte à la pérennité de l’ouvrage.

Atteintes aux bois

La stagnation d’eau peut provoquer, dans un 1er temps, l’apparition de moisissure et, dans un second temps, le pourrissement des bois. Ceci est particulièrement vrai pour les bâtisses à colombage anciennes.

Aspects visuels

Apparition d’auréoles sur les parements, premières traces de la présence et du développement de moisissure puis, rapidement, les peintures virent au gris pour, enfin, voir cette moisissure en surface.

Aspects sanitaire

Qui dit moisissures dit émission de spores et présence d’acariens de la moisissure. Les 2 sont fortement allergisants et provoquent moult rhinites, pharyngites, otites et autre éventuelles angines.

Comment pouvons-nous gérer la vapeur d’eau ?

En émettant moins de vapeur d’eau

C’est, à n’en pas douter, la méthode la plus simple, la moins coûteuse et la plus durable. Pour ce faire, il faudrait vivre moins longtemps dans l’habitat, nous laver moins, ne jamais faire sécher de linge à l’intérieur, cuisiner le moins possible, jamais à la vapeur … En un mot, renoncer à quelques 50, 60 ou 70 ans de “croissance de niveau de vie”. Peut-être acceptable pour certains, peut-être même souhaitable pour d’autres, mais est-ce acceptable par le plus grand nombre ? Probablement pas !

En limitant les conditions de son stockage dans l’air

Limiter le chauffage de la maison à 14°C ou 15°C

Là aussi, cette solution est assez simple et … radicale : chauffer, comme autrefois, à 14 ou 15° et conserver nos maisons en l’état de passoire, pas seulement énergétique, mais aussi en terme de courants d’air. Là encore, régression de quelques 50, 60 ou 70 ans de gain de confort. Là aussi, combien sont disposés à ce sacrifice ? Probablement peu et c’est légitime.

Alors, que faire ?

Tout en conservant nos progressions en terme de niveau de vie et de confort, prendre toutes dispositions qui permettront de sauvegarder la qualité de l’air intérieur, de limiter l’apparition de moisissures avec leur cohorte de conséquences, d’empêcher les désordres sur les bâtis.

Les actions à mener pour …

Renouvellement d’air

Il s’agit de renouveler l’air intérieur en l’extrayant. Ce faisant, en évacuant l’air intérieur saturé de vapeur d’eau, on provoquera son changement par de l’air extérieur, moins saturé (de l’air extérieur à 5° et à un taux d’humidité relative de 90%, donc très élevé, ne sera plus, une fois chauffé à 19° qu’aux environs de 35%, c’st à dire très sec). Ce sujet a été abordé ici dans un article intitulé “Qualité de l’air, pourquoi et comment ventiler ?

Régulation du transit de vapeur dans les parois extérieures

Pour éviter que les isolants thermiques extérieurs soient saturés de vapeur d’eau, certains diront qu’il suffirait d’opter pour des isolants non fibreux tels que des polystyrènes, soit en tant que composants des murs via des coffrages, des éléments de structure, des remplissages avec des mousses isolantes ou encore de mettre en œuvre des mousses polyuréthanes projetées.

D’autres diront qu’il suffirait d’étanchéifier les parois à 100%, tant à l’eau liquide qu’au transit de la vapeur d’eau, via des membranes non perspirantes tels que des films polyane ou autres. Nous sommes convaincus que, tout comme nous respirons via notre système pulmonaire mais aussi via nos échanges cutanés, nos maisons ont tout autant besoin de renouvellement d’air que de perspirance via les parois extérieures.

La solution : prévoir un pare-vapeur

Régulation température intérieure avec un pare-vapeur

Quand les conditions le permettent, particulièrement dans le cadre d’une construction neuve (il suffit alors de concevoir correctement les parois extérieures) mais aussi lors de la rénovation, de l’amélioration ou de la transformation d’un habitat ancien, si les murs en sont perspirants, il est nécessaire de réguler le transit de la vapeur dans les parois extérieures.

Bien qu’aucune règle écrite n’y oblige ni qu’aucune analyse objective et scientifique ne l’étaye, il est couramment admis (et constaté) que la perspirance doit être progressive en cheminant de l’intérieur vers l’extérieur.

L’outil, le moyen, le système ou l’équipement le plus adéquat pour y parvenir : le pare-vapeur.

Est-il possible d’éviter la pose d’un pare-vapeur ?

Oui, dans des cas très précis, particulièrement ceux à isolation répartie, mais il s’agit plus d’exceptions que de possibilités courantes.

Conclusion : oui au pare-vapeur !

Une fois admise sa justification, voir sa nécessité, se posent alors de nombreuses questions :

  • quel type de pare-vapeur (membrane, panneaux …) ?
  • quelles capacités de perspirance ?
  • peut-il avoir des fonctions complémentaires ?
  • où et comment doit-il être mis en œuvre ?
  • dans quels cas peut-il être évité ?

Toutes ces questions démontrent à quel point ce sujet est vaste et c’est pourquoi nous reviendrons sur le sujet …

Et pour finir, je vous remets le lien vers le replay de ma conférence sur le sujet.

Claude Lefrançois


Après 30 ans dans le bâtiment, ancien charpentier, ancien constructeur, ancien maître d’œuvre, formateur dans le bâtiment, expert en analyse des bâtis anciens avant travaux, auteur de nombreux articles et d’un livre “Maison écologique : construire ou rénover” aux Ed. Terre vivante, auteur de 2 ebooks disponibles sur mon blog, je suis désormais retraité.
Je mets mon temps disponible et ma liberté d’expression à votre service : j’observe et j’analyse, au besoin je dénonce ou émet des idées.
Bonne lecture.

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