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Toopi Organics : et si vos urines se transformait en engrais ?

Nos urines contiennent un trésor ! Riches en azote, phosphore et potassium, elles sont surtout composées à 90 % d’eau et de 3 000 substances chimiques dont les plantes raffolent. L’idée a donc germé à cette start-up de récupérer cette urine pour la transformer en fertilisant bio et engrais. Explications…

L’urine, de l’or jaune liquide au service de l’agriculture

Michael Roes – Toopi-organics

Chaque année, plus de 18 millions de tonnes d’engrais minéraux sont utilisés en Europe. Les engrais les plus importés sont à base d’azote (29%), de phosphore (58%) et de potassium (78%). Notre agriculture, largement dépendante de l’importation, est étroitement liée à l’exploitation de ressources non renouvelables et menace la biodiversité, notre environnement et notre santé.

En outre, avec des prix du gaz qui battent des records, plusieurs fabricants européens d’engrais azoté diminuent leur production d’ammoniac. Une situation qui a des répercussions sur le prix et la disponibilité des engrais.

L’urine humaine est riche en Azote, Phospore, Potassium (N, P, K) et en micronutriments. Outre l’apport fertilisant qu’elle procure aux sols, c’est un excellent milieu de culture pour les microorganismes.

 

Si on veut arrêter de polluer massivement pour fabriquer des engrais, » assure Mickael Roes, le jeune patron de Toopi Organics dans un reportage de France Info, « on va être obligé de recycler les urines. Il n’y a pas le choix ! »

 

Or, l’urine humaine est aujourd’hui traitée de façon coûteuse (chasses d’eau) et énergivore (stations d’épuration) et souille 6000 milliards de litres d’eau potable par an en Europe.

C’est en partant de ce principe que le dirigeant de startup Toopi Organics, à Loupiac-de-la-Réole près de Bordeaux, a imaginé le processus breveté de récupération et traitement des urines.

 

En l’état, l’urine n’est pas un bon engrais car pas assez concentré. J’ai changé le paradigme en l’utilisant comme milieu de culture pour faire pousser des bactéries capables de remplacer les engrais chimiques » explique Michael Roes, le coprésident de cette société à Canal +

 

De la collecte au traitement de l’urine

Biofermenteurs

Toopi Organics collecte l’urine pure dans les bâtiments recevant du public comme les établissements scolaires, les aires de repos sur les autoroutes, les stades ou les parcs d’attraction, après quelques adaptations.

Une filtration est réalisée ensuite pour ôter les hormones, les antibiotiques et tout ce qui est toxique. L’urine filtrée et hygiénisée est mise dans de gros biofermenteurs de 5000 litres. On y ajoute du sucre et un concentré de bactéries avant de faire chauffer le mélange quelques jours. En fin de cuisson, le liquide obtenu est un fertilisant avec plein de bonnes bactéries 100% bio, sans déchet, sans odeur et pulvérisable tel que sur les champs.

Aujourd’hui testé et breveté, le procédé de Toopi Organics est une solution écologique moins onéreuse que les intrants chimiques actuellement utilisés dans l’agriculture.

 

Le produit fini est même utilisable en babyfood, l’alimentation pour les bébés », affirme Michael Roes qui n’a toutefois pas encore osé y goûter.

 

Un modèle économique qui a passé le stade de gestation

Toopi Organics obtient ainsi un engrais bio. Le rendement est intéressant car un litre d’urine donne un litre de produit, il n’y a pas de pertes.

 

Le phosphate coûte aujourd’hui 1 000 euros la tonne. » Soit pour les agriculteurs une somme de 130 euros à l’hectare. « Quand on met notre produit dans le champ, on enlève 50% de la dose de phosphate et notre produit coûte 20 euros, avec la même efficacité. » se targue Michael.

 

Une cinquantaine de pays industriels l’ont déjà contacté pour adopter sa technologie. Toopi Organics compte déployer ce modèle à grande échelle en installant et opérant des unités de valorisation territorialisées en partenariat avec des acteurs locaux. La startup ambitionne ainsi de multiplier les unités de transformation : 20 en France, pour éviter le transport.

L’entreprise collecte déjà 3 millions de litres d’urine par an mais projette d’en rassembler un minimum de 50 millions de litres d’ici cinq ans.

 

Tout ce qu’on peut produire est déjà vendu pour les 3 prochaines années ». assure son dirigeant à Midi Libre.

 

Déjà lauréate d’une trentaine de concours, dont i-Nov et i-Lab, mais aussi membre du French Tech Green20, la jeune deeptech est étudiée par l’équipage 240 de Club Mars encadré par l’ISAE-SUPAERO (institut supérieur de l’aéronautique et de l’espace) dans le désert de l’Utah, dans la station The Mars Society !

L’entreprise distribue déjà le premier produit biostimulant urino-sourcé au monde, LACTOPI START. C’est un biostimulant urino-sourcé toute culture à base de bactéries lactiques Lactobacillus paracasei. Il solubilise le phosphore retenu dans les sols et stimule le développement des plantes et des racines.

Et si nos toilettes participaient à la fabrication d’engrais

Actuellement, tous types d’établissements peuvent être équipés de collecteurs d’urine :

Si le maillage des unités de production se réalise comme son créateur l’ambitionne, on peut aussi imaginer une récupération auprès de particuliers équipés de toilettes sèches à séparation.

 

«  L’urine c’est notre pétrole. Il s’agit d’une matière première disponible en grande quantité et aux usages industriels multiples, de la production d’acides à celle de protéines pour l’alimentation animale  » conclut  Mickael Roes le cofondateur de  Toopi Organics.

 

Cette innovation écologique moins onéreuse que les intrants chimiques actuellement utilisés dans l’agriculture s’inscrit dans un modèle circulaire, local et reproductible. On peut juste s’interroger sur la qualité du filtrage de ces urines, étant donné la quantité de polluants et (mauvaises) bactéries et virus que nous rejetons naturellement !

Plus d’infos sur Toopi Organics et dans cette vidéo réalisée par la chaîne Courir pour la Planète de Philippe Moreau.

Crédits Images : Toopi Organics, lhennen de Pixabay

Editeur et Rédacteur en chef de Build Green, le média participatif sur l'habitat écologique et pertinent. Passionné par le sujet de l’éco-construction depuis 2010. Également animateur de nombreux réseaux sociaux depuis 2011 et d'une revue de web sur : Scoop.it