L’algue : un matériau ancestral sur le retour dans la construction

Et si les algues s’avéreraient être le matériau innovant de demain dans le bâtiment, notamment pour la construction et la protection contre les intempéries de futures maisons ?

Ce matériau naturel est antibactérien, absorbe l’humidité, non toxique et résistant au feu. En outre, sa croissance est désormais plus rapide en raison de l’augmentation des niveaux de dioxyde de carbone, selon le Building Center basé au Royaume-Uni. Serait-ce le bon moment pour exploiter son potentiel ?

Une histoire qui remonte à l’Antiquité

Les algues seraient utilisées dans la construction de bâtiments depuis l’époque des Grecs de l’Antiquité, qui utilisaient ce matériau comme isolant des murs. Selon le Building center, les Grecs remplissaient des ossatures en bois d’algues et les recouvraient de plâtre ou d’argile afin de garder leurs maisons au chaud.

Par ailleurs, selon Haeckels, les Danois utilisaient des algues dans la construction de leurs maisons. 20 maisons de l’époque viking se trouvent encore aujourd’hui sur l’île de Læsø, au Danemark.

Un matériau expérimenté dans de nombreux pays

Selon Haeckels, « environ une tonne de CO2 est rejetée pour chaque tonne de ciment produite ». Cela est dû au processus de cuisson et à la réaction chimique au cours du cycle de production. Les maisons aux algues, en revanche, réduisent la pollution nocive, car les plantes marines absorbent plus de carbone que la construction n’en produit pour chaque maison.

Ainsi, de nombreux projets utilisant des algues sont déjà réalisés ou en cours.

La Modern Seaweed House, conçue par le cabinet Vandkunsten, est l’une de ces maisons, comme l’a détaillé le Building Centre. Achevée en 2013, la structure utilise une ossature en bois et une isolation aux algues, semblable à une méthode grecque antique.

Un autre projet, situé à Læsø, est isolé par des filets remplis d’algues puis fixés à la façade et au toit du bâtiment. Cette méthode absorbe les particules d’eau, évite les incendies et maintient une température constante.

Omar Vazquez Sanchez, fondateur de la société Blue-Green au Mexique, a construit une maison en 15 jours avec des algues marines comme matériau de construction principal. Ses maisons totalement écologiques, présentent un bilan carbone négatif : les gaz à effet de serre emprisonnés par les algues et le bois excèdent largement la quantité d’énergie totale nécessaire à leur construction.

Au Colorado, Skidmore, Owings & Merrill (SOM) s’est associé avec Prometheus Materials  pour mettre au point des blocs à base d’algues microscopiques : Bio-Block Spiral, une brique de construction à base de micro-algues qui piège naturellement le carbone.

Des innovations aussi en France

En France, plusieurs innovations prometteuses ont été réalisées dans le domaine des matériaux de construction à base d’algues.

Algeabrick est un projet de recherche, mené par l’Université de Technologie de Compiègne et l’entreprise Matière, vise à développer des briques biodégradables et biosourcées à partir d’algues marines. Les algues sont transformées en un liant naturel qui remplace le ciment traditionnel, réduisant ainsi l’empreinte carbone du matériau.

Soucieux de trouver une solution pour la valorisation des sargasses invasives aux Antilles, Nicolas Vernoux-Thélot (agence In Situ Architecture) s’est lancé le défi d’un programme de recherche en partenariat avec le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) et les sociétés Nobatek/Inef4 et Tox Sea In. Or, il s’avère qu’après plusieurs tests, les propriétés thermiques d’un mélange terre et fibres d’algue présente un coefficient lambda similaire à d’autres matériaux biosourcés. Ainsi, le consortium envisage plusieurs gammes de matériaux : briques de remplissage, hourdis pour les poutres et les planchers, panneaux isolants…

Un autre projet de recherche, porté par l’Université de La Rochelle et l’entreprise Algopack, explore l’utilisation d’algues pour produire des biocomposites à base de carbone. Ces matériaux pourraient être utilisés pour fabriquer des panneaux de construction, des meubles et d’autres produits durables.

In Vivo est un ensemble immobilier de 13 000 m² de logements en accession, intermédiaires et étudiants et jeunes chercheurs, auxquels s’ajoutent des laboratoires et des tiers lieux dédiés à l’innovation. Ce projet comprend l’Algo House avec sa façade bioalguée. L’agence d’architecture s’est associée à des chercheurs du CNRS pour mettre au point le procédé : ils ont fabriqué un photo bioréacteur, une sorte d’aquarium vertical ultra plat, alimenté par de l’eau et du gaz carbonique, pour nourrir les algues. Le phyto plancton s’y développe, coincé entre deux parois de verre. Un échangeur thermique est placé à l’arrière de ces vitres un peu spéciales pour réguler la température des facades et capter l’énergie dégagée par les microalgues.

Enfin, la marque française Algo a développé une gamme de peintures écologiques, fabriquée à base d’algues bretonnes. Contrairement aux peintures traditionnelles qui contiennent jusqu’à 65% de substances d’origine pétrolière, la peinture à base d’algues préserve la qualité de l’air intérieur des logements et participe au bien-être des habitants tout en participant à la valorisation des algues du littoral.

Ces innovations prometteuses démontrent le potentiel des algues comme alternative durable aux matériaux de construction traditionnels. Elles offrent de nombreux avantages environnementaux, tels que la réduction de l’empreinte carbone, l’amélioration de l’efficacité énergétique et la diminution des déchets.

Si la plupart de ces matériaux à base d’algue sont encore au stade de recherche et développement, leur adoption à grande échelle n’est pas encore à l’ordre du jour.

 

 

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Pascal Faucompré
Editeur et Rédacteur en chef de Build Green, le média participatif sur l'habitat écologique et pertinent. Passionné par le sujet de l’éco-construction depuis 2010. Également animateur de nombreux réseaux sociaux depuis 2011 et d'une revue de web sur : Scoop.it

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