IntAirieur : un label qui ne manque pas d’air … pour qui ?

La qualité de l’air intérieur est un sujet ô combien important dans la conception d’un habitat écologique et pertinent. Nous avons donc été intrigués, interpellés, de découvrir qu’un nouveau label, IntAIRieur, vienne se positionner sur ce créneau si délicat et impactant pour la santé de l’occupant.

Il est indéniable que la qualité de l’air intérieur de nos bâtiments est loin d’être bonne. Selon les logements, elle pourrait même être 4 à 5 fois plus polluées que l’air extérieur. Inquiétant !? Bien sûr puisque notre air intérieur, et surtout cette pellicule fine qu’on retrouve sur nos meubles « contiendrait en effet une quantité non négligeable de substances chimiques nocives, dont des agents cancérigènes« , des phtalates, phénols, perfluorés, 45 molécules chimiques détectées d’après cette analyse d’études américaines. Sans compter que la prise en charge financière des malades et les pertes de productivité constatées engendreraient 19 milliards d’euros de coût (selon Batiactu).

Alors rendre nos intérieurs plus sains est devenu un enjeu majeur de santé publique justifiant que nombre d’acteurs s’emparent du sujet. Et ce nouveau label n’échappe pas à la règle.

Un label initié par qui ?

D’après le communiqué, IntAIRieur a été élaboré « grâce à une réflexion collective menée sur plusieurs années par des acteurs publics, des opérateurs privés et des citoyens« . Mais alors qui sont ces acteurs ? Pas vraiment d’information à ce sujet.

Sur le site IntAIRieur, on présente l’APQAI, l’association qui porte ce label :

« L’Association de Promotion de la Qualité de l’Air Intérieur est née en septembre 2017 de la volonté de Polyexpert Environnement et de professionnels de mettre en avant les problématiques liées à une mauvaise qualité de l’air intérieur. »

Aucune indication sur le n° d’inscription ni sur le conseil d’administration de cette association et après une recherche, sur le journal officiel, aucune information. Mais, compte tenu de la jeunesse de l’association, ne présageons de rien. Les informations vont certainement nous être données prochainement.

Et cette association serait constituée « de 7 collèges, l’association anime un réseau d’intervenants experts autour de la problématique de la qualité de l’air intérieur dans les bâtiments. » Là encore aucune information sur les membres de ces « collèges » ?

Sur Polyexpert, on découvre un peu plus d’information : la société « développe une gamme de prestations destinées aux Directions Générales, Entreprises, Managers des risques et Responsables financiers des entreprises, en matière d’analyse et d’évaluation des risques. » Un expert en assurance ?!

Societe.com nous en dit un peu plus sur l’activité : « évaluation des risques et dommages (6621Z)« . Son dirigeant, serial entrepreneur, a des participations dans une quantité incroyable d’entreprises.

Comment et par qui est attribué ce label ?

D’après le site IntAIRieur, « le processus de labellisation comporte 3 phases de validation correspondant aux étapes de vérification de l’opération par l’auditeur agréé INTAIRIEUR ». Passons sur la procédure représentée graphiquement ci-contre et qui reste évidemment floue compte tenu de l’enjeu (commercial).

Mais qui sont ces auditeurs ?

Le référentiel reste lui-aussi au stade de l’évocation. Et qui le développe ?… Immolab, « Filiale de Polyexpert Environnement, spécialiste reconnu dans le domaine de la qualité de la construction ». Et comme par hasard, « IMMOLAB est également un organisme de formation dédié aux auditeurs vérifiant la conformité des opérations immobilières aux référentiels. »

La boucle est bouclée ?

Nos interrogations :

Alors au sein de notre groupe de référents Build Green, nous nous sommes interrogés sur l’opportunité. Parmi ces membres Claude Lefrançois et Guillaume Demarque nous proposent leurs remarques :

Claude s’interroge : « à qui profite réellement ce(s) label(s) : au vendeur pour valoriser le bien ou à l’acheteur pour sécuriser son achat ? »

Pour Guillaume « quand d’autres labels prennent déjà en compte dans leur grille d’évaluation, ce label ne fait-il pas double emploi ? »

Pour ma part, je ne trouve pas d’informations, dans les quelques éléments fournis, sur les ondes électromagnétiques ou sur l’impact du mobilier et des équipements (électroménager, TV, …) ajoutés une fois le bien vendu ? Aura t-on des contrôles a postériori ?

Et au final, comme le souligne Claude, « pour qui voudra être conforme à tous les labels, ne faudra t-il doubler le budget global ?« 

 

Notre avis : comme pour le label produit biosourcé, nous ne doutons pas que la vocation principale de ces certifications soit d’aider les entreprises qui les valorisent à mieux vendre leur produit. On comprend tout à fait sa justification pour la mise en oeuvre de bâtiments à vocation sanitaire ou scolaire, mais pour de l’habitat ? Il nous semble important que les bureaux d’études, les architectes et constructeurs soient sensibilisés à cette problématique de l’air intérieur. Se former à ce sujet est désormais incontournable, surtout que le décryptage des fiches FDES n’est pas à la portée de tous. L’intérêt de ces labels ne serait-il pas de donner une ligne de conduite aux politiques pour nous proposer des réglementations pertinentes ?

 

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Pascal Faucompré
Editeur et Rédacteur en chef de Build Green, le média participatif sur l'habitat écologique et pertinent. Passionné par le sujet de l’éco-construction depuis 2010. Également animateur de nombreux réseaux sociaux depuis 2011 et d'une revue de web sur : Scoop.it

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